Sur quelle Espérance fondons-nous notre dynamisme missionnaire ?

« L’espérance c’est comme une pierre de grande valeur qui se trouve dans un mur, cachée au milieu des autres pierres, semblable à toutes les autres et en même temps comme chaque pierre elle est unique. Une pierre que la propriétaire veut récupérer… parce qu’elle a l’intention de vendre la maison… » (« parabole » tirée de mon expérience de maçon)

Une pierre dans le mur d’une vieille maison, recouverte d’un vieux crépi, et qui ne se distingue pas au premier coup d’œil…

« Le mystère de l’Incarnation est un mystère caché … caché dans son humanité, connu d’un très petit nombre l’espace de 33 ans …  » (Le P. Baudouin dans la Règle Primitive)

De son temps Jésus n’a pas été découvert, reconnu dans sa véritable identité par ses contemporains, on le connaissait comme le fils du charpentier, comme « le gars à Marie ». « Quel est cet homme ? » : question qui courre tout au long des évangiles et finalement il faudra attendre le dernier moment pour entendre le centurion dire : « Vraiment cet homme était Fils de Dieu  »Mc 15,39 mais surtout attendre la force, le dynamisme d’un souffle (Esprit) puissant qui fera sortir les disciples de la « chambre haute » pour aller reconnaître le Ressuscité dans le monde des vivants, parmi les hommes et non parmi les morts ou en regardant le ciel.

Nos textes le parlent des : « semences du Verbe, mystérieusement caché dans toute expérience humaine  » (Const FMI 8). Fidèle au Mystère de l’Incarnation qui est un mystère caché, notre congrégation reste attentive aux semences de vie dans l’ordinaire de chaque jour. Notre charisme est notre trésor

Dans cette vieille construction qu’est notre société vieillissante touchée par la crise, recouverte, atteinte de plusieurs maladies qui la fragilisent : le chômage, la précarité, la souffrance au travail, le repli sur soi, le rejet de l’autre, les inégalités… y a-t-il place pour l’espérance ?

Comment reconnaître les semences de vie dans l’ordinaire des jours ? les signes de résurrection ? Comment découvrir, reconnaître le visage du Christ parmi tous ces visages de femmes, d’enfants, d’hommes que nous rencontrons à longueur de jours ? Comment rendre témoignage à ce mystère : « et le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous », ce qui semble bien être notre mission selon le n° 1 de nos constitutions fmi ? « Depuis que Dieu s’est homme, tout visage humain devient le lieu de sa rencontre…  »

Découvrir ce visage, le reconnaître, mais ne pas faire comme on l’a fait pour la pierre, c’est à dire ne pas le retirer, ne pas l’extraire du monde, ne pas se l’accaparer, ne pas le récupérer : sa place est au milieu de son peuple : « au milieu de vous se tient celui que vous ne connaissez pas. » Jn 1,26

Témoigner de cette bonne nouvelle que nous portons comme un trésor et que nous voulons partager.

Nous l’avons dit, comme membres de la famille de l’Incarnation notre mission est de «  rendre témoignage à ce mystère : « et le Verbe s’est chair et il a habité parmi nous. ». «  Nous n’irons pas à d’autre école : celle-là suffit. »

Voilà la Bonne Nouvelle dont nous voulons témoigner ; certes nous la portons comme un trésor cette Bonne Nouvelle, comme baptisés et d’une manière spécifique comme membres de la famille de l’Incarnation, mais cette Bonne Nouvelle, cette espérance ne sont-elles pas déjà inscrites au cœur de notre humanité ?

Qu’est-ce qui peut nous faire dire cela ? Qu’est ce qui peut nous faire adhérer à cela ? En somme sur quoi se fonde notre espérance ? C’est là, je crois, qu’intervient la notion de promesse.

L’espérance nous vient d’une promesse de Dieu depuis Abraham. Tout au long de la bible, Dieu se révèle en ouvrant une promesse d’avenir, promesse de terre promise, promesse d’une alliance nouvelle, qui oriente l’histoire et la vie de l’humanité vers une nouveauté de vie et de bonheur. Dieu s’est engagé dans l’histoire.

Les prophètes ont su attiser ce feu de l’espérance. (Is 25,6-9) «  le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ». Sans oublier les paumes qui sont à la fois des cris de détresse, d’angoisse, mais aussi des chants de louange, et de confiance en Celui « qui guérit les cœurs brisés, soigne les blessures, élève les humbles. » Ps 146 Avec Jésus de Nazareth, cette promesse de vie nouvelle se réalise pour tous ceux qui s’approchent de lui, les malades, les prostituées, les affamés, les publicains, les pécheurs. Tous les bancales de la société. Au cœur de l’histoire, il y a un projet de Dieu, d’un Dieu qui veut le bonheur des hommes : «  Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son fils … pour que le monde soit sauvé. » Jn 3,16-17 et cette phrase, toujours dans St Jean : « je suis venu pour que les hommes aient la vie et qu’ils l’aient en abondance  » Jn 10,10

Voilà le fondement de mon (notre) espérance : dit autrement : dans ce monde mal foutu, fragile, cassé, Dieu a bien voulu venir y habiter, en faire sa demeure ; ça veut dire que ce monde malgré ses défaillances, a du prix à ses yeux. (Is. 43,1-4)

Mais cette « espérance, elle est entre nos mains, elle n’existe pas si on ne se bat pas pour elle, elle n’existe pas si on ne s’engage pas pour elle, elle ne va pas se faire automatiquement. »Mgr Rouet.

Le point fort, le point culminant de cette espérance …le mystère pascal Car « de fondement nul ne peut en poser d’autre que celui qui est en place : Jésus-Christ » 1Cor3,11

Seulement ça, c’est le credo et il ne suffit pas de l’exprimer ou de le réciter à la messe le dimanche, encore faut-il voir comment ce mystère pascal est vécu dans notre vie et autour de nous… en nous appuyant sur ces paroles que nous rapportent les évangiles : « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps. » Math 28,20, « Voici qu’il vous précède en Galilée, c’est là que vous le verrez » Math 28,7 et 10, en Galilée, loin du centre.

Notre dynamisme missionnaire s’appuie sur cette certitude que le Christ vivant nous précède dans les Galilées d’aujourd’hui.

Nous n’apportons pas aux autres ce qu’ils n’ont pas, mais nous les rejoignons sur leur route pour découvrir avec eux les traces du Christ ressuscité déjà là. La foi est une démarche de reconnaissance de ce qui est déjà donné secrètement.

« Si j’aime les êtres avec tant d’ardeur, c’est qu’en chacun d’eux j’aime une parcelle de toi, mon Dieu. Je te cherche partout dans les hommes et je trouve souvent une part de toi. Etj’essaie de fouiller dans les cœurs des autres pour te mettre au jour, mon Dieu. » Etty Hillesum

Antoine Brethomé FMI
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