Des entreprises minières venues de l’étranger
Depuis cette décade, les entreprises minières se sont implantées, d’abord avec un capital canadien. Maintenant, avec l’entreprise « Ecuacorrientes », elles sont devenues propriété de la Chine. Pour obtenir le terrain, l’entreprise a mené une politique de pression sur les propriétaires. Face à la situation de grande nécessité, aggravée par la forte crise vécue dans le pays en 2000, quelques familles de la zone ont vendu leur terre à l’entreprise minière. Plus tard, on a découvert que l’entreprise avait payé 400 $ l’hectare de terrain, alors qu’il était estimé à 10000 $.
Propriété en servitude de la mine. Des chemins sont ouverts sur les flancs de la montagne.
La pollution de l’environnement est visible à l’œil nu
Affrontée à ces diverses violations, la Communauté locale CASCOMI a sollicité un audit de la Commission Générale de Contrôle de l’État. Dans son rapport remis le 24 septembre 2013, cette Commission constatait un grand nombre d’irrégularités et faisait des recommandations. Malheureusement, aucune d’entre elles n’a été suivie d’effet.
Rivière contaminée par la boue suite à l’ouverture des chemins
Comme l’entreprise n’avait rien prévu au moment d’ouvrir des voies d’accès à la mine, la terre déblayée a été jetée à la rivière et l’a contaminée.Même les troupeaux ne peuvent plus boire de son eau.
La communauté indigène défend ses droits
Les indigènes « shuar » et « kichwa » sont présents à Tundayme depuis le début du XXe siècle. Le 21 août 2014, l’ État équatorien a reconnu la communauté indigène comme personne juridique sous le nom de CASCOMI (Communauté Amazonienne de l’Action Sociale de la Cordillère du Condor Mirador). C’est à partir de cette société collective que les indigènes défendent leurs droits et font valoir que leur terre n’est pas à vendre !
Voici des membres de la communauté CASCOMI
Face au harcèlement de l’entreprise minière, la communauté CASCOMI s’est manifestée. Mais par différentes astuces, l’entreprise continue à s’approprier de plus en plus de terres, avec l’agrément du Gouvernement qui y voit un projet d’exploitation stratégique. L’entreprise intervient actuellement sur quelque 12000 hectares et a déjà calculé qu’elle avait besoin du double. La superficie totale de la municipalité de Tundayme est d’environ 25000 hectares. L’entreprise minière a déjà la concession de 85% de cette surface.
L’église, l’école et les maisons sont détruites sans avertissement
Le cas du quartier de San Marcos, en Tundayme, est symptomatique : l’église et l’école ont été détruites le 12 mai 2014. L’église et l’école avaient été construites en 1983 par la communauté sur un terrain communautaire. Elles avaient été construites grâce à des « mingas » (travail collectif gratuit), mais il n’existait aucune preuve écrite (réalité très commune en Équateur). L’entreprise minière convoite ce terrain pour faire une « relavera » (lavage de minéraux)
Le 30 septembre 2015, alléguant des droits de Servitude de la Mine, on a procédé à l’expulsion forcée de 15 familles de San Marcos, sans aucun avis préalable d’ordre d’expulsion ni proposition de quelque autre alternative. Ici s’est vécu violation, impossibilité de défense et intimidation.
La Servitude de la Mine est une forme administrative qui figure dans la Loi Générale de l’Industrie Minière, selon laquelle l’entreprise peut prendre en usufruit les terres nécessaires pour implanter son exploitation, durant toute la période de la concession, étant entendu qu’il y ait eu une compensation adéquate pour les propriétaires. Ce point d’accord et de compensation pour les propriétaires est resté lettre morte.
Nous avons visité une famille expulsée vit actuellement dans une cabane prêtée dans la vallée de Kim
Notre visite de solidarité à Tundayme
Devant ces évènements, avec une compagne de Caritas Ecuador nous avons formé un groupe de trois religieuses de la « Commission Justice et Paix » et « Intégrité de la Création » de la CER (Conférence Equatorienne des Religieux). Puis, du 4 et 6 décembre 2015, nous avons visité Tundayme dans le but de connaître, par nous-mêmes, la situation et de poser un geste de solidarité pour les victimes des expulsions en leur apportant des biens de première nécessité. Nous avons pu constater les conditions précaires dans lesquelles vivent les habitants et leur situation d’impuissance. Alors qu’il faudrait que la loi s’applique et que justice soit faite, les défenseurs des droits de l’homme et de la terre sont soumis à des intimidations.
La photo ci-dessus : c’était la seule maison qui restait encore au pied de San Marcos. Elle a été rasée le 16-12-2015. Sur le mur, le panneau indique qu’elle est propriété communale de CASCOMI.
Lamentablement la situation s’est encore aggravée . Le 16 décembre 2015 a eu lieu une nouvelle destruction de maisons en Tundayme. Le même procédé a été employé : les pelleteuses sont arrivées dans la nuit et les habitants ont été sommés de quitter les lieux dans l’espace de cinq minutes. Les décombres des maisons détruites ont été enterrés sur le lieu même, dans le dessein de ne laisser aucune trace. Il semblerait que Tundayme soit appelé à disparaître, au nom d’un bénéfice économique qui prime sur tout le reste : la destruction de l’environnement est irréversible et les personnes sont considérées comme une gêne sans plus.
Notre visite nous a permis d’être témoins de la force de la communauté CASCOMI et de sa détermination sans faille pour défendre cette terre qu’ils considèrent comme partie intégrante d’eux-mêmes. Pour notre part, cela renforce dans notre engagement à défendre la nature et les peuples qui y vivent, conscientes que Dieu est à leur côté dans une expérience de mort et de résurrection.
Mariangel raconte une histoire aux enfants.
L’équipe des visteurs : Luis Sánchez, presidente CASCOMI ; por la JPIC : Teresa Sarango, Rosario Figueroa, y Mariangel Marco ; de Caritas, Daniela Andrade.
Mariangel a passé la Semaine Sainte à Tundayme, vous pouvez voir sur le site photos et reportage.